« L’injustice est muette, la justice crie, « Jean de Rotrou ».
👉J’ai souvent remarqué que le sentiment d’injustice réveille, chez vous qui le portez, une colère profonde. Mais paradoxalement, au lieu qu’elle soit tournée vers ce qui a réactivé la contrariété, votre colère sourde et muette vous prend rapidement pour cible. Pourquoi me direz-vous ?
Parce que pour contrer le sentiment d’injustice vous développez des facultés minutieuses, un perfectionnisme acéré, grâce auquel vous pensez vous préserver de revivre une expérience aussi souffrante. Votre mérite étant tel que vous ne voyez pas comment vous ne pourriez pas être récompensé-e, reconnu-e dans ce que vous avez vaillamment fait.
Or, non seulement la reconnaissance ne vient pas, mais en plus vous recueillez des remarques acerbes sur la qualité de votre travail ou de votre action.Et aussi surprenant que cela puisse paraître, vous vous dites que celui qui vous assène ces reproches a raison, et que vous auriez pu certainement mieux faire avec davantage d’application. Et vous voilà revenu-e à la case départ: aveuglé-e par la reconnaissance de votre mérite, vous repartez « en guerre », affinant, ajustant, perfectionnant jusqu’à l’épuisement. C’est votre comportement compensatoire.
🚦Aux mêmes causes, les mêmes effets. Jusqu’au réveil.
👉Je me suis récemment souvenue, à la suite d’une séance avec une cliente, d’un incident en grande section de maternelle, qui a eu un effet dévastateur dans ma vie. Si je me souviens bien, il était question d’un hibou à colorier. Evidemment, je n’avais pas respecté les consignes (ce qui ne m’étonne guère aujourd’hui!), et cet écart de coloriage a engendré des remarques de la part de mon institutrice, suffisamment violentes pour que je m’en souvienne près de 45 ans plus tard. Je me souviens que ma mère s’en était mêlée et elle m’a souvent dit que depuis ce jour-là j’avais nourri une rancune profonde envers cette instit, qui ne savait plus comment se rattraper tellement j’avais violemment vécu l’incident. Devant mes camarades bien sûr!
Peu importe, je me revois, petite fille, avec mes feutres et mes dessins sur la table du salon, déchirant chacun d’eux, chaque fois que j’estimais avoir débordé ou si le dessin ne me paraissait pas parfait. Et à bien regarder ma scolarité et ma vie tout court, quelque soit le domaine, je n’ai jamais eu de cesse de parfaire mes dessins. Jusqu’au jour où épuisée de me demander d’atteindre une perfection impossible qui ne fait que nourrir mon insatisfaction permanente, j’ai appris à me féliciter de « mes coloriages », sans plus attendre que quiconque me félicite. Car attendre tue.
👍Si vous avez lu cet article jusqu’au bout et que vous vous reconnaissez dans ce schéma, soyez rassuré-e, vous venez de faire un pas vers la guérison!
Félicitez-vous.